Commentaire pour 'Histoires et contes de ma plume...'
  • Sur la Delfra-Serena...

    Un homme âgé, aux cheveux gris, mais au regard ferme et sûr, enfoncé, imprégné dans son fauteuil de cuir, lisant un ouvrage en silence. Une casquette à coté de lui à quelques centimètres d'une tasse d'un liquide vert-gris. C'est un étrange silence, -coupé par le bruit d'un cliquetis de montre à gousset-, qui gouverne la pièce.

    L'homme laisse son esprit au silence, sa concentration est contemplative et analytique. Il ne cherche pas à argumenter dans sa tête une ligne ou une autre, un paragraphe ou un autre. Il ne cherche pas l'absolue compréhension et ne ressent pas le besoin d'en déduire une chose ou une autre.

    Derrière lui, un baie vitrée blindée particulièrement épaisse et grande donnant sur le vide spatial. L'espace semblant tout aussi arrêté que la pièce. Comme si le lieux était un sanctuaire hors temps. Un sanctuaire où cet homme en était le moine, l’abbé d'un instant.

    Il ne détournait pas les yeux, son attention semblait de l'extérieure être exclusivement réservée à ce livre, lourd comme un traité de médecine... Et semblant si âgé, le temps semblait avoir eu plus d'emprise sur le livre que sur son lecteur du moment. Mais il n'en était rien, l'homme était pour le moins, cent fois plus âgé que son papier à reliure...

    L'homme décrochât son regard de fer et de plume, glissant son far jusqu'à la porte d'acier et de plomb étanchéifiant la pièce de l'extérieur, même de l'air.

    Le vieux était marin, il avait la patience et la rigueur d'un homme dit, millénaire. C'est dans le silence qu'il attendait quelque chose provenant du couloir derrière cette porte... Pourquoi se presser, pourquoi aller vers une porte qui s'obstinera à s'ouvrir, il sait qui et pourquoi il viendra, il sait qui est son visiteur. Rien ne peut le faire douter de son avis, poli et ajusté à chaque instant. Il n'a pas de doute, il n'est prit d'aucune inquiétude, ni de la moindre joie.

    Il sait que la première chose qui sera énoncée est une fausse et pâle excuse de venir le déranger pour si peu, il sait qu'il va entendre une voix à moitié en pleur et sanglotante, pleurnichant des incohérentes paroles, ou gesticulations, à la limite du gutturale et grotesque enfant peureux venant voir son père pour lui réparer son jouet...

    Il s'en accommode bien de ce futur incontournable, il s'en amuserait presque, -et d'ailleurs qu'il a encore assez de temps pour l'écouter-, se dit-il tant il a une certaine affection pour lui. Celui-ci n'est pas son fils, mais en lui, il le sait, c'est son meilleur élève à en devenir.

    Et ça ne manque pas, la porte vient à s'ouvrir sur le couloir et un homme de taille assez normale s'approche, il n'est pas musclé ou droit comme un clou, il ressemble effectivement plus à son attitude... Un chien peureux, un adulte encore enfant, voûté vers l'avant, le regard fuyant. Un véritable lâche en attitude.

    Il bave ses paroles. Il vient car il ignore si il doit obéir au commandement de l'Armada Fédérale ou si il continue selon les instructions de "son maître", le vieux marin, toujours fondu à son fauteuil... Et ce, après des excuses plus longues que la question elle-même. Vous voyez le tableau, encore heureux que le vieux marin n'éprouve aucune animosité et qu'il n'a pas peur de "perdre" du temps de vie pour un "vomi abrutissant".

    Il laissa son livre descendre à ses cuisses, puis le laissa finalement posé ainsi. L'homme prit sa pipe, y mette un coup de cure-pipe, puis attrapa sa boîte d'allumette. Il l'ouvrit d'un simple mouvement de l’auriculaire droit, de la gauche, attrapa dans un geste à la limite de l'élégant une allumette et la craquât contre sa pipe avant de finalement bouter le feu au foyer de cette dernière.

    Ce n'est qu'après cet instant passant comme l'éternité et après avoir aspiré une gorgée de fumée de sa pipe de bois noble, il dénia s'ouvrir à la conversation avec le jeune homme.

    -Fils, n'as-tu donc point l'esprit tranquille? Quand je te dis que nous allons à l'ailleurs, tu n'as qu'à attendre que je te dise le contraire. Si tu ne peux attendre un ordre, peut-être est-ce que tu doute de tes oreilles ou de ta mémoire que pour ainsi venir me poser ainsi cette question.

    Le vieil homme reprit, à ta question, je répondrais que nous allons toujours vers notre destination, le commandement fédéral fait erreur sur l'impératif à remplir. Allons fils, retournes à ton poste et je te donnerais plus amples instructions quand j'en estimerais l'absolue nécessité.

    -Compris Camarade Luft-Erft-Dof. Il soupire et semble perdu, manquant de faire un nœud dans ses pieds, il retourna tel un enfant à ses devoirs à la passerelle. Il en oublia même de saluer son supérieur hiérarchique.

    D'un sourire sans aucun naturelle, comme paralysé, il fini par s'extraire de son fauteuil, il mit sa casquette et son long manteau noir. Et attrapant sa ceinture et son holster de hanche, il prit aussi sa hachette et mit sa pipe dans son accoutrement.

    Il sortit de sa pièce, en silence puis il se mit à chanter, sa voix de baryton fit trembler les murs d'acier des couloirs, et des compartiments à travers lesquels il marchait d'un pas calme.

    Et chaque fois qu'il posait le pied sur le sol, son corps lourd faisait trembler avec naturel le sol, tel un éléphant marchant paisiblement et imperturbable. Quand il passait à côté d'un membre de l'équipage, on ne pouvait qu'avoir le réflexe de s'écarter de sa route.

    Tous le savait bon, généreux et paisible pour ceux qui le côtoyaient au quotidien, mais sa taille imposante dépassant les deux mètres et quarante centimètres ne pouvait provoquer que la peur instinctive de se faire écraser sous le poids d'un colosse aux pieds d'acier. Quand un marin fédérale passait à côté de lui, il pouvait sentir le sol trembler, quand il le croisait, sa taille et son envergure faisait que n'importe qui le pensait encore plus grand.

    Cependant, comme par désire de soulager une part des craintes naturelles de sa taille, il se tenait toujours voûté, sa taille réduite par sa tête penchée en avant. Toute-fois, ceux l'ayant vu démontrer sa colère ou sa fureur au combat savent qu'il a pour habitude de jouer d'une gimmick de relever la tête et les épaules, démontrant ainsi toute sa présence et son envergure, gagnant ainsi jusqu'à 10 centimètres de hauteur.

    Le colosse marchant dans le couloir, il ne manque jamais de saluer chacun de ses marins avec respects. Chacun de ses camarades fédéraux et peu importe le grade ou la fonction, il les saluts tous et toutes. Peu importe l'âge. Et il se plait à plaisanter et à rire. Il le sait, les enfants l'adorent, comme un héro de roman ou un second près, un professeur, voir un model.

    Et quand il arrive enfin là où il voulait allé à bord, qu'il ouvra la porte, il prit place dans la file comme chacun de ses camarades et attendit son tour pour manger. Il avait pour habitude de fumer après son repas, il mangeait d'apparence beaucoup, jusqu'à 4 fois la quantité de ses congénères, personne ne lui en tenait rigueur, sa taille et ses muscles étant nécessiteux d'une quantité en proportion sensiblement identique, mais à la mesure de sa personne.

    Il ne buvait plus d'alcool depuis fort longtemps, il avait été alcoolique et avec sagesse, n'en consommait pas une goutte. Quand il devait s’asseoir, il s’asseyait avec les camarades fédéraux Optricans. Il en dépassait même d'une tête. Son gigantisme était une norme pour un Fédérale Patriote Optrican, mais pas pour un Fédérale Patriote Arttien. Le pauvre se disaient certains, ne pouvant se mettre à une table "conventionnelle" Lui s'en amusait.

    Il se savait né avec une bonne génétique, le rendant très résistant, qui plus-est, il avait l’intelligence de dix hommes. Il passait sans mal au dessus de toute considération et pour lui, rien n'était un problème. Il avait la volonté d'adapter le monde à sa taille, rien ne pouvait lui refuser une chaise, une table, un couteau et une assiette à sa taille.

    Respecté de tous, il mange avec sérénité et n'hésite pas à parler, à plaisanter et à s'amuser du peu pouvant encore le distraire après tant de temps d’existence. Pour lui, le temps semblait filer à une vitesse lumière. Chaque instant passé avec ses camarades, à étudier, à commander ou à écrire, à construire, à détruire ou à philosopher n'était qu'une fraction infime de seconde dans sa vie.

    La notion d'heure, de jour et de nuit n'était pas la même pour lui. Même quand pour certains, vingts années étaient un quart de leur vie, pour lui cela ne représentait que quelques heures dans sa mémoire. Il était vrai, il était la personne la plus âgée à bord. Sa conception des choses était très différente et pour lui, voir les gens naître, vivre et mourir n'était plus depuis longtemps, qu'une longue série d'évolutions, comme si il ne sentait pas ses propre cellule changer avec les années.

    Bien-sûr, il a conscience de la perte, mais cela est devenu presque banal, habituel, comme s'il cultivait un champ. Une graine plantée va peut-être arriver à maturité et quand vient le jour de la fauche, il ne récolte qu'une maigre quantité de survivantes. Ce sont ces derniers qui constituent ceux qui compte le plus pour lui.

    Les autres, il les traites avec respect mais ne s'y attarde pas plus que quelques instant pour juger leur valeur. Ce qui est vécu en années, par les concernés. Pour lui ce n'est qu'un battement de cil.

    Le vieux marin prend donc un temps raisonnable dont il fera toujours fructifier avec sagesse les actes posés. Et contrairement à certain qui, à sa place font le veut de bâtir un empire, de devenir infiniment riche et de se baigner dans un luxe éternel, lui se "contente" de faire de la recherche fondamentale et construire la paix dans la galaxie.

    Il ne cherche en rien la compagnie à tout prit, ses émotions n'ont pas à être portées par les vents. Si on ne l'écoute pas, il ne s'offusque pas, il sait qu'il a le temps et que tout est à relativiser. Et la trahison, il l'a déjà subit tant de fois, cela ne le touche pas. Pas d'affecte, il vie avec ses choix et avec le choix des autres.

    Une journée de plus, une mission de plus. Il avance pas à pas, le vieux marin n'est pas parfait, mais ses plans avancent et il est prêt à attendre.