Commentaire pour 'Histoires et contes de ma plume...'
  • Quelque part au nord de la ville portuaire de Fogajvané, sur le monde endo-idyllique de Sderan...

    Dans la boue, un homme se lève difficilement, elle colle et son poids est un fardeau de plus à porter. Dans les quelques mètres les plus proches de l'homme, des corps et d'autres personnes, certaines gueules cassées, d'autres estropiés, tentant de sortir du bourbier de racines, de glaise, de morceaux de chaires calcinées, de diverses éléments impossibles à identifiés.

    C'est au beau milieu d'une pleine artificielle, d'une forêt mise en miette par les bombardements et donnant à l'endroit, un semblant de sanctuaire étrangement paisible, mis à part les quelques gémissements et les cruelles râles des plus déchiquetés.

    De temps en temps, celui d'une femme, de temps en temps, celui d'un homme, un appel à l'aide par-ci, une supplique par-là. Certains appelant simplement, n'entendant plus rien, répétant sans cesse, "y a t'il quelqu'un?" Questions, tant de prières laissées sans réponses.

    Un homme sort du lot, il n'est que faiblement blessé et tente de se mouvoir, il cherche à sortir de la boue. Est-il seulement conscient de sa solitude paradoxale? Qu'entend-il vraiment? Entend-il seulement? La pluie tombe et celle-ci apporte-elle seulement une seule sensation à cette âme perdue?

    Car oui, l'homme est déboussolé, mais il trouve comme dans un réflexe induit par quelconque entrainement que ce soit, une arme dans la boue qu'il tente d'extirpée de cette dernière avec toute ses forces. Mais plus il tire, plus l'homme perd son équilibre et retombe au sol, il râle, gémis et se relève en bredouillant un seul mot.

    -Continuer. Continuer... Puis l'homme tente une nouvelle fois d'extraire le fusillé engluée dans la gadoue sombre recouverte par des éclats de bois. Qu'il fini par tirer de là, se roulant sur le coté et reprenant son souffle et gémissant tout en se tirant de son gisant.

    Il cria nerveusement et prononça quelques mots apprit par cœur, "Brigadiers, on n's'arrête pas!" Trainant misérablement ses genoux sur le sol mou, tentant de se remettre sur ses jambes, celles-ci trop lâches, fuyant désespérément leur rôle de pilier, l'homme cria encore "Avec moi, camarades! On a déjà fait ça cent fois!"

    Remuant de toute ses forces il se mit à ramper, se disant que si ses jambes l'abandonnaient, ses bras et sa tête "ne le feraient pas de si tôt", se rassurant peut-être d'une inévitable chute dans le sommeil, d'une inéluctable résolution de la perte de conscience.

    Qu'importe, il avance et appel encore "Levez-vous, on ne doit pas s'arrêter! Avec moi, brigadiers!"... Mais rien ne pouvait le donné moins tors que la faiblesse de ses jambes. Il était sans doute le seul encore en état d'avancer un ou deux mètres de plus.

    Au loin, un cri de femme, déchirant et funeste... Elle s'arrêta de crier, peu après un coup de feu. Une étrange surprise, un être habillé d'un manteau noir, d'une casquette et son visage recouvert d'un masque. D'autres êtres masqués, portant aussi des casquettes et équipés quant à eux de fusils.

    L'être à l'allure d'un spectre avait ouvert une arme en main, il avait abattu et réduit au silence ce cri de douleur. Et il s'avança vers ce qui restait d'un homme rampant telle une larve, un asticot sur une plaie recouverte par la putréfaction... Il ne vit pas arriver le spectre masqué, celui-ci l'aida à se relever...

    Une voix étrangement grinçante, presque irritante, sortant à peine étouffée par le masque s'adressa à l'homme.

    -Hé, Camarade? Vous m'entendez? Brigadier? Après un instant durant lequel, le spectre et le rescapé ne furent que plus surpris de la présence de l'autre en cet endroit, il reprit, "Brigadier être vous blessé? Quels sont vos besoins?"

    L'homme répondit machinalement, "On ne s'arrête pas! Encore quelques pas! La soupe et le pain! V'sentez ça?" Gémissant et soupirant d'épuisement... Le spectre criant: "Camarades Opérateurs Apothicaires! Ramassez-moi ce pauvre chien! Il en a assez vu pour aujourd'hui!" et ce, sur un ton de compassion pour la pauvre âme. "Pauvre chien des champs, pauvre égaré..." reprit-il en reprenant sa marche en ligne droite vers les arbres, et sa respiration profonde coupant chacun de ses pas.

    Les apothicaires se mirent à ramasser le gaillard tentant encore de se traîner et d'avancer dans la même direction que ce qui lui paru être un officier de l'Armada Fédérale.

    Et dans la gadoue, puis la foret, ils se mirent en route, allant au plus près de bruits de plus en plus forts, de coups de feux, d'explosions et de cris tous plus incompréhensibles les uns que les autres.

    La pluie, la gadoue, les éclats de bois tel du shrapnel et une étrange odeur de gaz de combats... Soufré et corrosif... Difficile d'imaginer pire enfer pour des fantassins... Quotidien morbide pour un temps et que tous espèrent voir s'arrêter.

    Le spectre silencieux avance et semble à son tour épuisé, lui et ses camarades rejoignent un camps pour la nuit.